mercredi 14 septembre 2011

11 septembre 2001 In Memoriam

Je suis un peu en retard, je sais. Malgré cette erreur impardonnable, je tiens à revenir sur les attaques du 11 septembre 2001 aux États-Unis, puisque déjà dix ans se sont écoulés depuis et que les Américains commémoraient l'événement la fin de semaine dernière.

Sur le plan personnel, j'ai décidé de souligner cet événement à ma manière: je me suis procuré d'une part le rapport final de la commission nationale sur les attaques terroristes contre les États-Unis. C'est la version officielle des attentats, dans laquelle la responsabilité est attribuée au réseau islamiste al-Qaida. Je me propose de le lire dans les prochaines semaines.

D'autre part, je me suis acheté quelques bouquins discutant de la validité de la version officielle sur les événements du 11 septembre 2001. Je ne pouvais passer à côté de l'ouvrage du français Thierry Meyssan: L'Effroyable imposture. Il est un défenseur connu de la fameuse "théorie du complot", allant jusqu'à soutenir que les attaques étaient une machination du complexe militaro-industriel américain. Dans la même lignée, David Griffin, professeur de théologie retraité de l'Université de Claremont, a lui aussi mis en cause la crédibilité de la version officielle dans plusieurs ouvrages, notamment: The 9-11 Commision Report: Omissions and Distortions.

Enfin, j'ai mis la main sur l'ouvrage de Guillaume Dasquié et Jean Guisnel intitulé L'Effroyable mensonge: thèse et foutaises sur les attentats du 11 septembre. Il s'agit d'un essai critique de la version "non-officielle" de Thierry Meyssan.

Avec ces ouvrages, je n'arriverai certainement pas à faire la lumière sur ce qui s'est véritablement passé le 11 septembre 2001. Je vous invite d'ailleurs à me faire des suggestions de lecture par rapport à cette question, car les miennes seront forcément incomplètes. Mais je suis exaspéré d'entendre les journalistes du Québec défendre aveuglément la version officielle, en refusant de la mettre en cause sous peine d'être accusé d'affabulation. Je suis tout autant exaspéré d'entendre les défenseurs de la théorie du complot exposer leurs idées sans aucune source crédible à l'appui de leurs affirmations. Je refuse de faire partie d'un de ces camps.

Qu'est-ce qui a changé depuis le 11 septembre 2001?

Je vous propose ici un méli-mélo de constats sur ce qui a changé depuis le 11 septembre 2011. Je l'avoue, je m'inspire ici de la forme employée par Vincent Marissal sur son blogue, le 11 septembre dernier.

- Une guerre en Afghanistan: Celle-ci est en cours depuis 2001 et n'est pas terminée. Aux dernières nouvelles, des talibans ont mené une attaque sur l'ambassade des États-Unis et le QG de l'OTAN à Kaboul, dans un des quartiers supposément les plus sécuritaires. Oussama Ben Laden a été tué par les forces spéciales américaine. À mon sens, cette guerre était justifiée - et l'est toujours - notamment parce qu'elle était encadrée par des résolutions de l'ONU (1378 et 1386). Rappelez-vous aussi que nous étions plusieurs à condamner le régime oppressif des talibans en Afghanistan.

- Une guerre en Irak: Celle-ci est en cours depuis 2003 et c'est certainement la plus grave erreur que l'administration de George W. Bush a commise. Premièrement, elle a été menée au nom d'un mensonge scandaleux, soit que Saddam Hussein et l'Irak détenaient des armes de destruction massive. Les troupes américaines ont fréquemment eu recours à la torture durant ce conflit, rappelons-nous la désolante histoire de la prison d'Abou Ghraïb, et des polémiques entourant celle de Guantanamo. La guerre en Irak a coûté 4 000 milliards de dollars au trésor public et explique en bonne partie (avec la crise des subprimes) les problèmes économiques actuels des Américains.

- Un Moyen-Orient en ébullition: Le fameux "Printemps arabe", qui débute en décembre 2010. Des mouvements de révolte un peu partout au Moyen-Orient, menant au départ des dictateurs Zine el-Abidine Ben Ali en Tunisie, Hosni Moubarak en Égypte et Mouammar Kadhafi en Libye. Je sais, il n'y a probablement pas de liens directs entre les attentats du 11 septembre 2001 et le Printemps arabe, même si la droite américaine aime penser que sans le départ de Saddam Hussein, ces révoltes auraient été impossibles.

Ces mouvements de contestation semblent toutefois infirmer une thèse qui a souvent été défendue après les événements du 11 septembre 2001, celle du "choc des civilisations" de Samuel Huntington. Grosso modo, Huntington soutenait que l'époque des grands conflits idéologiques était dorénavant terminée et qu'une époque de conflits religieux et culturels allait s'ouvrir. Le 11 septembre 2001, c'était ni plus ni moins le début de la guerre entre le monde occidental et le monde musulman.

Or, il faut insister sur le fait que les révoltes arabes ont été alimentées en grande partie par des forces laïques réclamant plus de démocratie et de transparence dans la gouvernance publique, Bien sûr, des groupes islamistes ont tenté de récupérer ces mouvements, mais ceux-ci n'ont aujourd'hui plus le choix de modérer leur discours s'ils veulent être écoutés de la population. Loin de vouloir confronter l'Occident, les mouvements révolutionnaires arabes souhaitent s'en inspirer pour avoir une démocratie plus fonctionnelle. En bref, le choc des civilisations ne serait qu'une illusion.

- Des mesures de sécurité accrues: Aux lendemains des attentats de septembre 2001, George W. Bush a fait adopter la loi antiterroriste du "Patriot Act", dans le but de donner aux agences fédérales (CIA, FBI, NSA) des pouvoirs spéciaux pour faire de l'écoute téléphonique, saisir des documents ou encore perquisitionner des propriétés privées. Ces mesures ont dernièrement été reconduites jusqu'en 2015. De nombreux groupes de défense des droits civils s'inquiètent de la construction lente d'un État policier répressif qui porte atteinte aux libertés fondamentales.

Au Canada, le premier ministre Jean Chrétien avait aussi fait adopter une loi antiterroriste en 2001. Celle-ci permettait par exemple d'incarcérer une personne sans mandat pendant trois jours, si un policier avait des motifs raisonnables de soupçonner qu'un acte terroriste était sur le point d'être commis. Cette loi est venue à échéance en 2007, mais Stephen Harper a dernièrement affirmé qu'il souhaitait la réactiver. Lorsqu'on se rappele l'attitude plus que cavalière du gouvernement Harper dans les affaires Maher Arar et Omar Khadr, on peut raisonnablement s'inquiéter de l'utilisation abusive que les conservateurs pourraient faire d'une telle loi.

- Une redéfinition du débat sur l'identité: Chantal Hébert faisait remarquer cette semaine que les événements du 11 septembre ont peut-être contribué à remettre en cause le modèle d'intégration canadien du multiculturalisme. Il y a quelques jours, Stephen Harper a déclaré sur CBC que l'islamisme était la plus grande menace à peser sur la sécurité du Canada! Il y a quelques années, ce genre de déclaration aurait soulevé une immense polémique au pays. De plus, on apprenait dernièrement, grâce à un câble diplomatique diffusé sur Wikileaks, que des hauts-placés du gouvernement canadien craignent que le multiculturalisme ne favorise la prolifération de groupes extrémistes au Canada.

Au Québec, le débat sur les accommodements raisonnables n'aurait peut-être pris une tournure si émotive sans les attentats du 11 septembre 2001.

- Un terreau fertile pour le conservatisme? On peut se poser la question. Une des idées de base du conservatisme - même s'il s'agit d'un courant aux multiples variantes - c'est qu'une société et un État, pour être sauvegardés, doivent avoir recours aux traditions et aux coutumes établies. Pour les conservateurs, la stabilité de l'ordre social est une priorité et c'est le rôle du gouvernement de la préserver. Quoi de mieux qu'une catastrophe hypermédiatisée de l'ampleur du 11 septembre 2001 pour laisser croire que notre monde est menacé? À mon sens, certains politiciens aux États-Unis et au Canada exploitent habilement le sentiment de peur qui anime plusieurs d'entre-nous à des fins électorales.

Cette attitude est une menace pour notre démocratie. Non seulement elle permet de justifier la mise en place éventuelle d'un État policier, mais elle fait aussi du politique le lieu où nos plus vils instincts sont exploités. Une démocratie saine, c'est celle où le politique est investi à des fins créatives, constructives et optimistes.

Souhaitons que les prochaines années en politique en soient teintées.







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