vendredi 16 mars 2012

La lanceuse d'alerte

Félix-Olivier Riendeau

Lorsque l'on évoque la guerre de Bosnie de 1992, on pense tout de suite au massacre de musulmans à Srebrenica et à la politique de purification ethnique qui avait été mise en place par les forces serbes.

La Yougoslavie était alors en processus douloureux de démantèlement en plusieurs républiques et la Bosnie cherchait à obtenir son indépendance, à la suite de la Croatie et de la Slovénie en 1991. Les autorités serbes de Yougoslavie, le président Slobodan Milosevic en tête, n'hésitèrent pas à venir en aide - à n'importe quel prix - aux Serbes de Bosnie afin d'empêcher la partition de ce qu'elles considéraient être leur territoire.

Une mission de paix de l'ONU fut alors déployée dans la région, les Casques bleus ayant comme mandat de "protéger les populations" qui se trouvaient enfermées dans des petites enclaves, c'est-à-dire des villes et villages assiégés par les forces serbes.

Ce que l'on se rappelle peut-être moins, ce sont les dérapages de plusieurs officiers de l'ONU au cours de cette intervention.

Le film "The Whistleblower"

Ce fut le pari de la réalisatrice canadienne Larysa Kondracki de faire un film racontant l'histoire vraie de Kathryn Bolkovac, une détective américaine embauchée par l'ONU afin de travailler en Bosnie d'après-guerre (elle se termine en 1995, avec les accords de Dayton), au sein d'une section de la force de Police internationale. Le film était d'ailleurs en nomination dans plusieurs catégories au gala des Génies, qui se tenait à Toronto la semaine dernière, mais il s'est fait voler la vedette par le superbe Monsieur Lazhar, de Philippe Falardeau. Le film a aussi reçu des nominations aux Oscars.

À travers ses enquêtes sur le terrain, Bolkovac apprend que des officiers de la firme américaine DynCorp, sous contrat par l'ONU, sont mêlés à des réseaux de prostitution et au trafic d'êtres humains. En raison de ses découvertes, son histoire est étouffée à l'interne et elle est congédiée injustement. Elle intente par la suite un procès - qu'elle gagne - à la firme DynCorp pour rétablir la vérité et sa réputation. Elle révélera aussi son histoire sur les ondes du réseau BBC en Angleterre. D'où le titre du film: celle qui attire l'attention et lance l'alerte sur un scandale difficile à croire.


La force du film tient certainement à la performance de l'actrice Rachel Weisz, qui incarne Bolkovac avec une intensité convaincante. L'intérêt du film tient aussi au sérieux du propos. Bien que l'ONU soit une organisation indispensable (n'avez-vous jamais entendu l'expression "si l'ONU n'existait pas, il faudrait l'inventer"?) et que ses interventions aient souvent été efficaces, elle a aussi connu aussi des ratés et il important de se les rappeler. Dernièrement, des Casques bleus ont même été accusés d'agressions sexuelles, notamment en Haïti et en Côte d'Ivoire.

Le film attire enfin l'attention sur un problème international méconnu, le trafic d'êtres humains. Selon un rapport présenté par l'ONU en 2009, il s'agirait là de l'activité criminelle la plus lucrative sur la planète, 2,5 millions de personnes seraient affectées par ce commerce annuellement. Ce sont surtout les enfants et les femmes qui sont les victimes de ce trafic qui est effectué généralement à des fins sexuelles, mais aussi pour la vente d'organes ou le travail forçé.

Un film à voir absolument.



1 commentaire:

  1. J'ai vu ce film dans l'avion, sans vraiment savoir à quoi m'attendre... Je l'ai terminé sous le choc! Effectivement, un excellent film, quoique dure par moment!

    Annie B:-)

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