vendredi 13 janvier 2012

Ce qu'il faut (ou ne faut pas) retenir de Margaret Thatcher

C'est aujourd'hui que sort en salle québécoise le film de Phyllida Loyd sur Margaret Thatcher "La Dame de Fer" (The Iron Lady). C'est l'actrice américaine Meryl Streep qui incarne à l'écran l'ancienne première ministre du Royaume-Uni, de 1979 à 1990. La plupart des critiques s'entendent pour dire que le jeu de Meryl Streep est impeccable. En ce qui concerne le scénario et la fidélité du portrait dressé de Mme. Thatcher, les avis sont plus partagés et déjà le film fait un petit scandale au Royaume-Uni. Plusieurs, dont le premier ministre actuel David Cameron, estiment que le film accorde une trop grande place à la vieillesse et à la démence actuelle de Thatcher, plutôt qu'à son héritage et son parcours politique.

Le parcours de Mme Thatcher

Fille d'un épicier de classe moyenne, elle fait des études en chimie et en droit. Dès l'âge de 24 ans, elle se lance en politique et fait sa première entrée à la Chambre des Communes en 1959. Elle a alors 34 ans. Elle prend la tête du Parti conservateur en 1975 et devient première ministre en 1979. Elle est la première femme à diriger un État européen. Elle reste au pouvoir jusqu'en 1990.

Lorsqu'elle prend le pouvoir en 1979, la situation économique mondiale est difficile et elle met rapidement en place une série de mesures néolibérales draconiennes: privatisations massives (British Airways, British Gaz), lutte aux syndicats et déréglementation du secteur de la finance. Sur la scène internationale, elle s'oppose à l'U.R.S.S. (nous sommes en pleine Guerre froide) et reste sceptique par rapport à une intégration trop étroite dans la Communauté européenne (elle s'opposait par exemple à la monnaie unique). En 1982, elle permet à la Grande-Bretagne de reprendre le contrôles des îles Malouines (dans l'Atlantique) qui avaient été envahies par l'Argentine quelques mois plus tôt. C'est sa détermination et son agressivité dans ce conflit qui lui a valu - de la part de la presse soviétique - le surnom de "Dame de Fer". Sa victoire attise le patriotisme britannique et lui vaut une grande popularité dans son pays.

Son héritage

Margaret Thatcher avait le sens de la formule et ne laissait personne dans l'indifférence. Plusieurs sont ainsi scandalisés lorsqu'en 1987, elle affirme à un magazine que "la société n'existe pas". Pour une personne ayant le coeur à gauche, il y a effectivement là une aberration. Mais avouons que cette phrase a le mérite d'être claire et permet de savoir à quelle enseigne logeait Mme. Thatcher. Pour elle, dans un groupe, il n'y a que des individus et des intérêts privés.

À gauche, Mme. Thatcher est considérée comme le diable. Ses politiques néolibérales seraient à l'origine de l'affaiblissement des syndicats, de l'accroissement des inégalités et des tensions sociales. À droite, Thatcher est vue comme la championne des budgets responsables, des réductions de déficit et de la responsabilisation individuelle. La droite aime bien rappeler que sous Thatcher, le nombre de propriétaires occupants a été augmenté (entre autres chez les assistés sociaux), de même que le nombre d'actionnaires britanniques.

Que faut-il retenir du parcours de Mme. Thatcher?

Pour ma part, je n'ai jamais été un partisan des thèses néolibérales. Je considère avec la gauche qu'elles sont à l'origine de l'accroissement des inégalités, une récente étude du Conference Board démontrant que celles-ci sont plus importantes que jamais au Royaume-Uni. Une des causes derrière cette hausse des inégalités est justement l'affaiblissement des syndicats et la réduction constante des transferts sociaux. On sait que le gouvernement Cameron a procédé à d'importantes coupures dernièrement, incitant des milliers de Londoniens à descendre dans la rue pour protester. Là-dessus, je crois qu'il faut rompre avec Thatcher.

À retenir toutefois, certainement le parcours d'une femme qui a su évoluer dans un milieu composé presque exclusivement d'hommes. Elle est aussi celle qui est restée au poste de premier ministre pendant la plus longue période, témoignant par-là d'un sens aigu de la stratégie politique. Enfin, Mme. Thatcher n'était certainement pas une girouette, comme trop de nos politiciens le sont à l'heure actuelle. Elle avait une vision claire de ce qu'elle voulait accomplir, même si cela pouvait lui attirer un certain nombre de critiques.

Voici un extrait du film:


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