Je suis allé voir la pièce de théâtre Ha ha! hier au Théâtre du Nouveau Monde (TNM). La pièce a été écrite par Réjean Ducharme en 1978 et la mise en scène conçue par Dominic Champagne. Au niveau de la distribution, elle était assurée par les comédiens François Papineau, Sophie Cadieux, Marc Béland et Anne-Marie Cadieux.
L'oeuvre de Ducharme
Je ne suis pas très familier avec l'oeuvre de Réjean Ducharme. J'ai lu deux de ses romans, soient L'avalée des avalés et L'Hiver de force.
Le premier m'avait rebuté. Pour plusieurs, je sais qu'il s'agit d'un chef d'oeuvre, mais je n'avais pas su digérer ce bouquin à l'époque (celle de mes 16 ans) où je l'avais lu. D'une part, je ne me reconnaissais pas dans l'histoire de cette jeune fille (Bérénice) névrosée et tiraillée par ses relations familiales difficiles. D'autre part, le style de l'auteur y est assez ardu et je n'ai pas eu la patience pour me battre outre mesure avec le texte.
J'ai beaucoup plus apprécié L'Hiver de force, cette histoire de deux correcteurs (André et Nicole) pathétiques qui tuent le temps et l'ennui par le visionnement de films, la consommation d'alcool et les virées dans les bars. Ducharme y critique notamment les pseudos intellectuels de gauche (hippies des années 1970) qui souhaitent réinventer le monde, mais se perdent plutôt dans un nihilisme destructeur. Le propos est plus près de mes préoccupations et le style plus accessible et surtout moins lourd que L'avalée des avalés.
J'arrivais donc au TNM avec une opinion partagée sur l'auteur et son oeuvre.
Ha ha!
Ha ha! raconte l'histoire de deux couples qui seront éventuellement appelés à cohabiter dans le même appartement. D'un coté Roger et Sophie, de l'autre Bernard et Mimi. Chacun des personnages est fortement névrosé, voire disjoncté.
Roger est un poète paresseux qui rédige ses "oeuvres" de son fauteuil, en fumant ses cigares et en insultant sa copine Sophie. Elle réagit aux quolibets de Roger de façon hystérique et comique, tout en l'insultant à son tour. Bernard lui n'a aucun autre intérêt que sa bouteille de vodka, tandis que Mimi est d'une naïveté et stupidité déconcertantes que tous cherchent malicieusement à exploiter à leur avantage.
Pendant deux heures, nous assistons donc à la descente aux enfers de ces quatre protagonistes, le tout - c'est étonnant - sur un ton humoristique. Un humour jaune et grinçant certes, mais un humour tout de même. C'est probablement la grande force de la pièce: celle de nous faire rire de situations qui ne devraient pas être drôles. Le texte est aussi rempli de jeux de mots et de néologismes parfois difficiles à saisir, mais souvent drôles et intelligents ("endurance-chômage", "lucifesse"...).
Je suis sorti du TNM soufflé par l'intensité de cette pièce et essoufflé par son rythme ultra-rapide. Le texte y est si riche que j'irai certainement me le procurer pour le lire et y apprécier les subtilités de langage de manière plus posée.
Suivez-ce lien pour une critique dans La Presse, ou encore écoutez Dominic Champagne présenter la pièce:
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